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  • jeanpouly

L’accessibilité à Internet : l’étalon or de l’inclusion numérique


Accéder à Internet est sans doute une question farfelue pour nombre d’entre nous tant cela est devenu naturel depuis que les vieux modems des années 90 ont disparu, que l’équipement informatique et la connectivité se sont généralisés car cela constituait pour la majorité d’entre nous sans doute, l’obstacle principal dans l’accès au réseau mondial. Et pourtant pour des millions de français et d’Internautes se trouvant dans différentes situations de handicap, comme la déficience visuelle ou auditive, la malvoyance, le handicap moteur ou cognitif, accéder à Internet est au mieux un parcours de combattant et au pire totalement impossible. C’est même souvent la double peine car accéder aux services d’Internet est souvent encore plus indispensable pour ceux qui ne peuvent se déplacer, voir ou entendre. Dans une société qui virtualise de plus en plus ses échanges, ses services administratifs, ses modalités de consommation, de travail ou d’enseignement, être exclus d’Internet c’est une condamnation à une mort.

Or selon Braillenet, une ONG spécialisée sur l’accessibilité numérique, seul 4% des administrations françaises déclarent avoir pris des dispositions pour respecter la loi puisque depuis 2009, un décret impose l’accessibilité de tous les sites internet publics. Pourtant ce combat est loin d’être celui d’une minorité car selon l’adage, quand on fait pour celui qui peut le moins, on fait pour celui qui peut le plus !

Comment définir l’accessibilité numérique  ?


On peut dire qu’un site Internet est accessible s’il garantit que son contenu est utilisable par n’importe qui, quelle que soit sa situation, son handicap et le matériel utilisé pour y accéder. Cela nécessite de respecter un standard mis en place par le World Wide Web Consortium (W3C) qui définit précisément les règle techniques à respecter dans la conception d’un logiciel ou d’un site Internet. Ce consortium mondial a lancé une initiative ( la Web Accessibility Initiative qui a émis 61 recommandations permettant de rendre le web accessible, notamment aux technologies d’assistance utilisées par les personnes handicapées.


Que sont ces technologies d’assistance ?


Les technologies d’assistance, quelles soient matérielles ou logicielles sont les différentes technologies qui permettent d’assister les personnes en situation de handicap dans leur accès au numérique. Ce sont par exemple des lecteurs d’écran, des loupes, des logiciels de synthèse vocale, de reconnaissance de caractères ou encore des claviers ou des imprimantes en braille. Pour les personnes malentendantes, cela peut être des technologies qui permettent la retranscription simultanée par écrit sur des écrans, des vidéos et des tutoriels doublés en langue des signes ou sous-titrés et bien sûr des retranscriptions textuelles. On a aussi des technologies d’accès pour des handicap moteurs avec des système de pointage laser pilotables par l’oeil qui déclenche des claviers virtuels sur l’écran.

Comment savoir si un site ou un logiciel est accessible ?


Il suffit de vérifier dans les mentions des sites si il respecte un ou plusieurs référentiels d’accessibilité. Il en existe deux en France : Accessiweb, créé par l’association Braillenet qui propose une labellisation en ligne sur trois niveaux (bronze, argent et or) le référentiel général d’accessibilité pour les administrations (RGAA) qui fonctionne lui aussi sur trois niveaux (simple A, double A et triple A). Enfin, il existe même une norme internationale de l’accessibilité numérique (le web content accessibility guidelines) qui est devenue un standard ISO depuis octobre 2012.


Quels sont les freins à cette accessibilité ?

Vue les taux actuels d’accessibilité des sites Internet, on peut penser qu’ils sont nombreux. Techniquement ce n’est pas si complexe si on prend en compte les standards dès la conception d’un site ou d’un logiciel. Certains développeurs et graphistes se plaignaient sans doute à juste titre de la complexité du standard, des appauvrissement fonctionnels et esthétiques des sites liées à l’application des normes d’accessibilité. L’évolution des technologies web et notamment l’adoption massive de l’HTML 5, le langage hypertexte de l’Internet vont permettre d’associer accessibilité et ergonomie.

Mais le frein principal est sans doute la méconnaissance des enjeux de l’accessibilité, le manque de formation des développeurs de site à ces standards et donc le déficit de culture. La formation est d’ailleurs un axe important de l’association Braillenet.

L’accessibilité requiert-elle un travail supplémentaire ?


C’est là qu’il est intéressant de se poser les bonnes questions. Si on ne prend pas ne compte l’accessibilité dès le départ, il va falloir faire des adaptation qui vont prendre du temps. Si au contraire, les normes sont intégrées dès le départ, on respecte non seulement une norme pour ceux qui peuvent le moins mais surtout, on s’enrichit d’un atout ergonomique pour ceux qui peuvent le plus. Dominique Burger, le Président de Braillenet, confiait récemment qu’il ne comprenait pas pourquoi Apple avait intégré dans la conception de l’Iphone la compatibilité avec les logiciels de reconnaissance vocale. Et la réponse est révélatrice. Pour Apple, concevoir le produit le plus avant-gardiste, le mieux conçu au monde, nécessite d’explorer les marges et les limites de l’utilisation, autrement dit de prendre en compte ceux qui peuvent le moins pour faire un produit parfait. Une vision inspirante pour tous les développeurs, ingénieurs et designers.

Ces enjeux sont-ils fondamentaux ?

N’oublions pas que le premier enjeu c’est de rendre accessible le superbe média qu’est Internet à des millions de personnes, près de 300 millions dans le monde, qui ne peuvent y accéder. Pour la majorité d’entre eux, c’est tout simplement comme si on ouvrait la porte d’une immense bibliothèque jusque là inaccessible. C’est une nouvelle vie qui est donnée, un accès à l’emploi, à la communication avec le monde, une capacité de s’exprimer, d’interagir. Bref, tout ce que nous faisons naturellement, tant que nous ne rencontrons pas une situation de handicap comme par exemple, une baisse de notre vision, une main dans le plâtre ou un problème auditif pour prendre des exemples qui parlent à tous.

Le deuxième enjeu dont je viens de parler avec l’exemple d’Apple est de permettre d’acquérir une culture de l’accessibilité pour concevoir des sites et des outils de plus en plus ergonomiques, accessibles à tous et donc facile à utiliser et à comprendre. Si on étend ce raisonnement un peu plus loin, on peut même dire que penser le développement d’Internet sans prendre en compte son accessibilité est une hérésie qui ne sert pas les intérêts du plus grand nombre. Nous serons tous un jour dans une situation de handicap de façon ponctuelle ou permanente et ce jour là, nous prendrons conscience que c’est justement dans ces situations qu’accéder à Internet est encore plus indispensable.

C’est d’ailleurs dans cet esprit universel qu’Internet a été conçu, comme le rappelle souvent Tim Berners Lee, l’un de ses illustres fondateurs.


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